Dreamgirl
La modification de Butor est un excellent livre fait de hauts et de bas. Les bas sont dans le présent de la diégèse, dans le train, dans l’attente. Les hauts sont dans les remémorations du personnage principal qui invoque les instants de bonheur passé avec Cécile. Je pourrais parler des images de Butor, de l’entre-deux femmes, de l’entre-deux villes, du Rome dans Paris (par exemple, les tableaux du musée que le narrateur visite), du Paris dans Rome (par exemple, les photographies sur le mur de la chambre de Cécile), de la mythologie de Butor, de la descente d’Orphée aux Enfers, du Sysiphe moderne et de plein de conneries. Je dirai simplement que ce livre touche et explique une vérité toute simple que bien des hommes devraient connaître : c’est-à-dire la scission inévitable qui s’effectue entre «la femme de ma vie» et la «femme de mes rêves». La femme de sa vie est Henriette. C’est la femme qu’il a aimée et qui a peut-être été un instant la femme de ses rêves. Seulement elle a glissé avec le temps dans la réalité, dans le quotidien, et elle est devenu la femme de sa vie, c’est-à-dire qu’il ne peut plus s’en passer pour vivre, que sans elle il n’a pas de vie. Cécile quant à elle est la femme de ses rêves, c’est-à-dire qu’il l’imagine plus qu’il la voit. C’est un peu comme Irmgard pour Simon dans La presqu’île de Gracq. Cécile est la femme de ses rêves parce qu’elle permet au héros de supporter sa vie, de supporter la femme de sa vie. Il ne faut pas vivre avec la femme de ses rêves, il faut l’aimer. Et comme ça le personnage principal oscille entre deux formes vides, entre deux concepts : vie et rêve. Ce qu’il y a de bien avec une femme de rêves c’est qu’elle peut combler plusieurs hommes à la fois.
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Apophtegme : la femme de mes rêves me permet de supporter la femme de ma vie.
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