Lovecraft à Québec
Ai pris une marche tout près de chez moi jusqu'à l'édifice Saint-André. Et la plaque est là, bleue, vernissée: "H.P. Lovecraft a séjourné ici..."
L'immeuble est massif, rénové en partie; quelques logements y ont été ajoutés, des oriels, de la brique blanche d'un mauvais goût moderne. Mais les anciens appartements s'élèvent toujours au-dessus d'une base de gros blocs granitiques qui se transforme, plus haut, en une suite de briques crêmes. En chaque coin de l'immeuble se hissent des lierres dénudées par l'hiver, comme des veines noires qui, au coeur de la résidence, trouveraient quelque source où s'abreuver.
Et je me demande lequel de ces appartements à vraiment connu Lovecraft, ses pas, sa haine, ses désespoirs et ses solitudes. Je sonne au hasard. Par l'intercom une voix chevrotante me répond.
- Pourrais-je visiter, je suis un simple passant, admirateur de Lovecraft.
- Partez, il est tard, et puis les admirateurs de Lovecraft, vraiment, faut pas leur faire confiance.
Je comprends tout à fait, je ne me ferais pas confiance non plus. J'ai beaucoup trop lu pour ça.
Je repars, attristé; mais quand même ma ville est neuve, est grande, a connu l'Histoire. Je n'y étais pas (dirait Musset), mais ma cité, si longtemps ennuyeuse, y était. Enfin elle est devenue un livre, un peu, comme les Paris, les Londres, les New York de ce monde - et chaque rue est une page tournée.
Québec m'excite à nouveau; elle redevient l'aventure de mes premières découvertes adolescentes.
Oui, peut-être qu'une nuit je buterai contre un objet lourd, dans le parc au bas de la rue, un objet obscur à demi enterré. Je creuserai et se dévoilera à moi le Nécrono...enfin ce livre qu'on ne peut pas nommer.
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